Communiqué de presse concernant l'arrêt A-3607/2022, A-3629/2022, A-4762/2022, A-4764/2022

Arrêts concernant l’activité économique de la Poste dans le secteur privé

Le Tribunal administratif fédéral clarifie des questions juridiques fondamentales en lien avec l’activité économique de la Poste suisse dans le secteur privé. Il donne raison à deux entreprises privées en litige avec la Poste.

22.11.2024

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Selon le Tribunal administratif fédéral, la PostCom doit examiner si l’activité économique de la Post dans le secteur privé respecte les limites constitutionnelles. (Image: Keystone)
Selon le Tribunal administratif fédéral, la PostCom doit examiner si l’activité économique de la Post dans le secteur privé respecte les limites constitutionnelles. (Image: Keystone)

En octobre 2020, la Poste suisse a acquis la société KLARA Business SA (aujourd’hui ePost Services SA), une entreprise privée qui développe et distribue des logiciels en matière de comptabilité et de gestion des clients et des commandes. En juillet 2021, la Poste suisse a racheté la société Livesystems SA, active dans le domaine de la publicité extérieure numérique. Les deux entreprises sont aujourd’hui gérées en tant que sociétés filiales indépendantes de la Poste.

Deux dénonciations à l’autorité de surveillance
Avec ses deux filiales ePost Services SA et Livesystems SA, la Poste exerce une activité qui dépasse le cadre du service universel. Elle se trouve ainsi en concurrence directe avec des entreprises privées comme Abacus Research SA et Goldbach Neo OOH SA, qui offrent toutes deux des services identiques ou comparables. Ces entreprises ont déposé deux dénonciations distinctes en matière de surveillance auprès de la Commission fédérale de la poste (PostCom) et de l’Office fédéral de la communication (OFCOM). Elles font valoir que l’activité économique de la Poste suisse dans le secteur privé n’était pas autorisée. Elles demandent en conséquence l’annulation de l’acquisition des deux entreprises ou, à tout le moins, l’adoption de mesures pour empêcher des distorsions de concurrence. La PostCom et l’OFCOM ne sont pas entrés en matière sur les dénonciations au motif que les deux entreprises en question n’avaient pas la qualité de partie en ce qui concerne l’activité économique de la Poste dans le secteur privé. Les deux entreprises ont recouru contre ces décisions de non-entrée en matière auprès du Tribunal administratif fédéral (TAF).

Arrêts du TAF
Dans ses arrêts, le TAF examine la jurisprudence du Tribunal fédéral relative à l’activité économique de l’Etat dans le secteur privé. Il retient que la liberté économique garantie par la Constitution ne confère pas aux particuliers une protection générale contre la concurrence. Il en va de même pour l’activité économique privée de l’Etat, lequel est alors simplement considéré comme un concurrent supplémentaire sur le marché. Cependant, l’activité économique privée de l’Etat est limitée par la Constitution : l’activité doit reposer sur une base légale, elle doit poursuivre un intérêt public et être proportionnée et neutre en termes de concurrence. Conformément à ces exigences, l’activité de la Poste suisse est réglementée et limitée par la loi sur l’organisation de la Poste : la Poste est tenue de garantir le service universel et peut fournir des services connexes.

Dans ce contexte, le TAF développe la jurisprudence actuelle. Il retient que la qualité de partie ne peut pas, en principe, être acquise par le biais d’une dénonciation à l’autorité de surveillance. Si toutefois, comme dans le cas d’espèce, des entreprises privées font valoir de manière fondée, qu’une entreprise publique ne dispose pas d’une base légale suffisante pour exercer une activité économique particulière dans le secteur privé ou n’agit pas de manière neutre sur le plan de la concurrence, il existe alors une relation étroite particulière. Dans un tel cas, la qualité de partie des entreprises privées ne peut en principe être niée. La PostCom est compétente pour vérifier si la Poste respecte les limites imposées par la Constitution dans l’exercice de son activité économique privée. Pour ces raisons, le TAF admet les recours et renvoie la cause à la PostCom. Il s’agira pour elle de décider si les recourantes bénéficient de la qualité de partie et, le cas échéant, d’examiner si la Poste dispose d’une autorisation suffisante pour accéder au marché dans le cadre de son activité économique privée. 

Ces arrêts sont susceptibles de recours au Tribunal fédéral.

Contact

Rocco Maglio
Rocco Maglio

Attaché de presse