Plus que jamais, la Charte éthique est nécessaire
La justice se voit actuellement confrontée à des critiques émanant du Parlement, des médias, de la société civile et même, plus récemment, de la Faculté. On nous reproche tantôt de ne pas en faire assez pour atteindre nos objectifs. Tantôt de ne pas fonctionner de manière efficace. Tantôt encore de juger selon des critères plus politiques que juridiques. Ces critiques sont naturellement graves et doivent être prises au sérieux. D’aucuns suggèrent que, devant l’urgence et la nécessité, il y aurait lieu de modifier notre organisation et notre fonctionnement. On va jusqu’à soutenir qu’il faudrait remettre en cause les principes énoncés dans notre Charte éthique.
La Charte éthique comme un référent général
Ce serait oublier un peu vite qui nous sommes et pourquoi nous nous sommes dotés de ces principes. Ils expriment en effet des règles de vie à l’intérieur de notre Tribunal pour que nous puissions accomplir au mieux notre mission fondamentale qui est de rendre des décisions impartiales et de bonne qualité dans un climat de travail le plus harmonieux possible. Si nous avons édicté ces règles, c’est que nous étions conscients de devoir remplir un mandat de service public. Elles traduisent l’idée que nous ne sommes pas une finalité en soi.
«La Charte éthique rappelle les principes fondamentaux de notre fonctionnement. Elle exprime les principes qui doivent nous guider pour surmonter toutes les difficultés qui sont étrangères aux causes elles-mêmes.»
Gérald Bovier
Et pourtant ces règles ne sont pas, il est vrai, aisées à vivre au quotidien. Il faut y travailler. Nous tous qui composons le tribunal sommes l’expression de la société globale. Dans toute sa variété, sa richesse, mais aussi dans toutes ses contradictions. Une société divisée et parfois même écartelée, lorsqu’il s’agit d’apprécier les sujets de société contemporains. Il faut donc porter une réflexion sur la façon d’œuvrer ensemble. C’est là que des règles de conduite, comme un référent général, sont les bienvenues. Bien que générales et non contraignantes, elles sont utiles. Même si elles interpellent et interrogent, sans répondre définitivement. Jusqu’où va l’indépendance ? Peut-on être impartial, alors que chacun a sa culture, son parcours de vie, ses valeurs ? Où commence le préjugé ? Jusqu’où va le respect de l’autre, lorsqu’un juge doit dans le même temps affirmer son indépendance?
Trouver un équilibre
Et pourtant, nous devons trouver un modus vivendi. C’est une affaire d’équilibre. Comme toujours, lorsqu’il est question de vivre et de travailler ensemble. Le monde qui nous entoure est devenu hypercritique. Nous vivons dans ce monde, au cœur de ses réalités, de ses évolutions. Nous ne pouvons pas y échapper. Mais nous avons un mandat constitutionnel, le citoyen nous fait confiance. Nous devons nous montrer dignes de cette confiance, malgré la polarisation de la société et malgré les attentes contradictoires qu’elle génère.
La Charte éthique rappelle les principes fondamentaux de notre fonctionnement. Elle exprime les principes qui doivent nous guider pour surmonter toutes les difficultés qui sont étrangères aux causes elles-mêmes. Les principes qu’elle énonce doivent nous aider à nous concentrer sur l’essentiel, doivent nous permettre de prendre la distance qui convient pour mieux pouvoir juger. Elle est donc plus nécessaire que jamais dans le contexte actuel. Elle doit nous inspirer pour affirmer notre indépendance comme institution, notre rôle de 3ème pouvoir, au-dessus de la mêlée. Soyons fiers de ce texte et du rôle pionnier que nous avons pu assumer en l’adoptant!
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